Doublement des franchises médicales : la réaction d’OTMeds

Publié le 22 janvier 2024 Dans la catégorie : Communiqués de presse , ,

Le gouvernement annonce pour fin mars le doublement des franchises médicales. Pourtant, toute augmentation du reste à charge entraine des renoncements aux soins et un accroissement des inégalités en santé. Face aux conséquences sanitaires, prévisibles, de cette mesure, le gouvernement infantilise les malades. Il estime en effet que seule une hausse des dépenses individuelles de santé pourrait les « responsabiliser ».

Dans les faits, la mesure participe au transfert des dépenses de santé de l’Assurance maladie aux individus. Elle s’inscrit dans une stratégie de privatisation accrue de la Sécurité sociale et du système de santé. Le gouvernement piétine, dans la foulée de ses prédécesseurs, les fondements de la solidarité, selon lesquels chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.

La responsabilité en la matière ne consiste pas à opposer la prise en charge d’un problème de santé et le budget, mais bien à guider les dépenses publiques de façon rationnelle pour garantir le droit effectif de toutes et tous à la santé.

Il faudrait par exemple évaluer la pertinence des prix des médicaments, de plus en plus exorbitants, alors même que les financements publics à la recherche et au développement aident, souvent massivement, les industriels dits privés1. Le gouvernement agit sans élément rationnel pour guider les dépenses en médicaments et produits de santé : aides publiques reçues, investissements réels des entreprises dans la recherche et le développement, coût de production, marge des intermédiaires, etc. Il faudrait aussi faire baisser le prix des traitements princeps (sous brevet) par les moyens légaux que le droit international et national autorise, comme la licence obligatoire, qui permet de produire ou d’importer des génériques d’un médicament encore sous brevet, et par la mise en place d’une production au moins en partie publique. La réduction des prix illégitimes des nouveaux médicaments permettrait de réorienter les dépenses de santé vers les besoins réels des personnes.

De même financer des actions de prévention et de santé publique permet d’améliorer le bien-être et la qualité de vie, de réduire le nombre de morts, tout en réduisant les dépenses pour la prise en charge de maladies évitables. Le quasi-abandon de toute politique pro-active pour prévenir le COVID-19 (purificateurs d’airs, promotion des masques FFP2, vaccins…) a des conséquences dramatiques sur la santé et la vie gâchées, mais a aussi un poids économique : hospitalisation, remboursement des traitements, arrêts maladie. De même, le refus gouvernemental de soutenir une action comme le Dry January ou l’abandon de campagnes d’information sur l’alcool pour satisfaire le lobby viticole sont irresponsables tant sur le plan de la santé publique, que des dépenses qui pourraient être évitées en réduisant par exemples les cancers liés à l’alcool.

Il n’y a donc aucune raison d’opposer économie et santé comme le fait le gouvernement quand il s’en prend aux malades. Face à cette irresponsabilité et ce dogmatisme, il faut sortir des logiques de silos qui séparent économie, santé publique, prévention, ou soins et replacer les impératifs de santé au cœur des débats en s’appuyant notamment sur la société civile : usagers, patients, soignants, chercheurs, etc. Notre santé nous appartient.

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1 Nous avons proposé des éléments rationnels pour guider les politiques pharmaceutiques dans notre Check-List de la Transparence. En mai 2019, les États-membres de l’Organisation Mondiale de la Santé adoptaient à l’unanimité une résolution appelant à faire la transparence sur ces informations pour permettre la fixation juste des prix des traitements. Dans son avis de novembre 2020 sur l’Accès aux innovations thérapeutiques, le Comité consultatif national d’éthique recommandait lui aussi la transparence afin que le régulateur retrouve du pouvoir dans les négociations. Dans son rapport rendu public le 6 juillet, la commission sénatoriale d’enquête sur les pénuries de médicaments et les choix de l’industrie pharmaceutique appelle à « conditionner les aides publiques et incitations fiscales à l’industrie pharmaceutique, améliorer la transparence quant à leur utilisation et leur évaluation qualitative » (Recommandation n°30, page 34).

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