Mission interministérielle sur le médicament : conflits d’intérêts à tous les étages et marge de manœuvre limitée

Publié le 6 mars 2023 Dans la catégorie : Communiqués de presse ,

Ce mardi 7 mars, OTMeds sera auditionné par la mission interministérielle chargée de faire des propositions sur les mécanismes de régulation et de financement des produits de santé. Cette audition se tient dans le contexte de pénuries structurelles de médicaments essentiels, en constante augmentation. Nous y rappellerons l’État à ses responsabilités pour garantir la sécurité sanitaire de la population.

En 2017-2018, un rapport d’une commission d’enquête du Sénat rappelait déjà l’urgence de mettre en place des mesures concrètes pour faire face aux pénuries de médicaments1. En 2019, le gouvernement français s’était engagé aux côtés des États membres de l’OMS à mettre en œuvre la transparence sur toute la chaine pharmaceutique pour améliorer l’accès aux médicaments et produits de santé, contrôler l’explosion de leurs prix et lutter contre les pénuries. Cette résolution2 n’a toujours pas été mise en œuvre. Dans son adresse aux Français du 12 mars 20203, le président de la République Emmanuel Macron avait lui-même reconnu la nécessité que la puissance publique reprenne la main sur la production des biens de santé. C’était il y a trois ans.

Pire, depuis le début de la pandémie de Covid-19 et alors que les pénuries de médicaments explosent, que notre dépendance dans la production pharmaceutique à la Chine et l’Inde saute aux yeux, l’exécutif a annoncé en février mettre en place un plan de lutte contre les pénuries dans 6 mois. Ce délai supplémentaire est autant incompréhensible qu’irresponsable.

OTMeds s’interroge par ailleurs sur la marge de manœuvre de cette mission interministérielle. D’une part, des orientations et décisions ont déjà été prises par le gouvernement. Celui-ci a par exemple indiqué que des augmentations de prix des génériques seraient nécessaires pour combattre les pénuries de médicaments. Il s’agit du discours des multinationales du médicament, et l’opacité qui entoure le secteur pharmaceutique empêche de mesurer le bien-fondé de cette exigence. A quoi sert cette mission si des décisions sont déjà prises, sans être éclairées par du rationnel ?

D’autre part, la mission, qui ne compte aucun médecin, chercheur, pharmacien, épidémiologiste, est composée pour moitié de représentants des industriels de la santé, dont l’ancien président du LEEM, le lobby des multinationales pharmaceutiques en France. Comment la mission pourrait-elle préconiser des solutions contraires aux intérêts des actionnaires des entreprises pharmaceutiques, telle la production publique ou la transparence, mais nécessaires à la santé, avec un tel conflit d’intérêts ?

1https://www.senat.fr/notice-rapport/2017/r17-737-notice.html

2https://otmeds.org/communique-de-presse/prix-des-medicaments-vote-dune-resolution-historique-sur-la-transparence/

3« Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner, notre cadre de vie au fond ,à d’autres est une folie. »

https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2020/03/12/adresse-aux-francais
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