L’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (OTMeds) lance l’initiative ‘Pénuries COVID-19’. Il s’agit de recenser pour mieux les combattre les pénuries de matériels de protection, de médicaments, de tests, ou encore d’oxygène, particulièrement utilisés dans la lutte contre le COVID-19, et de documenter les effets de ces tensions sur la qualité de la prise en charge.
Pour témoigner d’une pénurie ou de tension d’approvisionnements, écrivez- à : penuriescovid19@gmail.com – @OTPenuries sur Twitter
L’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicaments (OTMeds) lance aujourd’hui l’initiative « Pénuries COVID-19 ». Il s’agit de recenser pour mieux les combattre les pénuries de matériels de protection (masques, sur-blouses, gants, etc.), de médicaments, de tests, ou encore d’oxygène, particulièrement utilisés dans la lutte contre le COVID-19. Au-delà du recensement, il s’agit de documenter les effets de ces pénuries sur la qualité de la prise en charge.
Les tensions et ruptures de stocks des médicaments font déjà l’objet d’une expertise1(comme celle du TRT-5 et de son observatoire des pénuries, le travail de France Assoc Santé ou le récent rapport de l’UFC Que Choisir, ou encore les nombreux textes de OTMeds sur le sujet).. Le projet « COVID-19 » vient en complément, et vise à documenter spécifiquement les pénuries constatées pendant cette crise. Nous nous appuyons sur une démarche en sciences sociales, afin d’évaluer comment ces pénuries sont anticipées et prises en charge.
Les pénuries lors du premier confinement
Au printemps dernier, pendant la première vague de la pandémie en France, certains de ces équipements et médicaments essentiels étaient venus à manquer dans nos hôpitaux ou en ville. En avril, aux côtés d’une coalition de collectifs de soignants, associations de malades et de juristes, nous avions saisi le Conseil d’État pour exiger la réquisition sur le sol français des moyens de production pour produire les matériels, tests et médicaments dont nous avions besoin et qui manquaient cruellement.
Ces pénuries et fortes tensions ont eu pour conséquences de dégrader la prise en charge de patients et de faire reposer sur les soignants des dilemmes éthiques insoutenables. Des médicaments essentiels à la prise en charge de la fin de vie avaient par exemple été supprimés des protocoles de soins dans certains services (gériatrie, soins palliatifs) pour masquer les pénuries. Pendant de longues semaines, les masques chirurgicaux étaient restés introuvables pour le grand public, y compris pour des personnes testées positives au COVID et/ou au contact de personnes « à risques ».
Le gouvernement et les autorités avaient adapté les recommandations scientifiques aux pénuries, et parfois ouvertement menti en affirmant par exemple en mars que les masques étaient inutiles, ou que l’extension du dépistage prôné par l’OMS était contre-productif. Tout en documentant d’éventuelles pénuries qui se produiraient aujourd’hui, l’initiative « Pénuries COVID-19 » documentera cette période, notamment dans le but de comprendre où le système a été défaillant et de proposer des solutions. Bien loin de limiter ces tensions, carences et ruptures aux seuls facteurs conjoncturels, nous posons les pénuries comme un problème structurel causé par la privatisation de la production des biens de santé et l’opacité sur toute la chaine du médicament.
Au nom du droit à la santé, à l’équité et l’universalité d’accès aux soins, principe fondateur de l’Assurance maladie, au droit à mourir dans la dignité, nous ne pouvons tolérer que de tels médicaments et matériels viennent à manquer. Inquiets de l’impréparation de l’État lors de la première vague, et de la désorganisation généralisée qui se manifeste encore, par exemple à l’école, nous avons décidé de lancer cette initiative, dans le but de recenser d’éventuelles nouvelles pénuries. Il est intolérable que les situations vécues en avril se reproduisent, et il est intolérable que l’on s’habitue à celles-ci.
A ce jour, si de nouvelles carences en médicaments n’ont pas été rapportées, des tensions sur les stocks d’oxygènes dans certains hôpitaux laissent redouter le pire, alors que le pic de la deuxième vague n’est pas atteint, comme l’indiquait le directeur général de la santé Jérôme Salomon en début de semaine. Des pénuries de gants ont par ailleurs été signalées.
Quant aux masques FFP2, et alors que les modes de contamination par aéroportage du virus se précisent, ils restent quasiment introuvables en France en dehors des hôpitaux, ne font plus partie des protocoles de soins dans bon nombre de services hospitaliers, et n’ont jamais été vus en pharmacies de ville depuis le début de l’épidémie. Pourtant, chez certains de nos voisins européens, leur usage est généralisé à l’ensemble de la population. L’été aurait pu être l’occasion pour l’État de lancer une production à grande échelle de ces masques.
Nous ne comprenons pas cette incapacité à anticiper mais nous constatons avec inquiétude qu’elle est toujours là. C’est pourquoi notre initiative aura pour but d’alerter sur ces éventuelles pénuries, d’en décrire toutes les conséquences, de nourrir éventuellement toute action judiciaire, plainte contre les autorités ou requêtes au Conseil d’État, et de contrer d’éventuelles manipulations des recommandations médicales telles que nous avons pu les constater depuis le début de la crise.
Si vous souhaitez témoigner d’une pénurie ou de tension d’approvisionnements, écrivez-nous à : penuriescovid19@gmail.com
Notes
- 1(comme celle du TRT-5 et de son observatoire des pénuries, le travail de France Assoc Santé ou le récent rapport de l’UFC Que Choisir, ou encore les nombreux textes de OTMeds sur le sujet).