Dimanche 17 octobre est paru au Journal Officiel le décret d’application de l’amendement Transparence voté l’an dernier lors des débats pour le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021. Le décret est très en deçà de ce qu’il est nécessaire pour éclairer les débats sur les dépenses de santé.
En mai 2019, l’Assemblée mondiale de la santé adoptait une résolution appelant les États membres à assurer la transparence sur divers aspects économiques de la chaine du médicament, notamment les montants des investissements ou les aides publiques reçues. La transparence est indispensable pour guider les politiques de santé et orienter les dépenses. Ainsi, la fixation rationnelle des prix de médicaments, de vaccins ou encore de réactifs doit-elle prendre en compte les aides publiques versées aux multinationales : pourquoi notre argent devrait-il payer au moins deux fois, à des prix exorbitants, le même produit ? Au-delà des enjeux économiques, l’opacité est directement responsable de l’explosion des pénuries ou encore des inégalités mondiales dans l’accès aux vaccins.
Il aura fallu deux an et demi à la France après la résolution pour en retranscrire une part minime par le vote d’un amendement, dont un an pour publier un décret d’application (Décret no 2021-1356 du 15 octobre 2021). En pleine pandémie, ce délai repousse encore d’un an la production d’informations indispensables qui permettraient d’évaluer la légitimité des prix demandés par l’industrie pharmaceutique pour le remboursement de médicaments et vaccins. L’attentisme du gouvernement ralentit donc la mise en place de politiques de prix éclairées.
D’autre part, cet amendement est très insuffisant car il limite les informations demandées aux firmes. Elles n’auront à livrer que le montant des aides directes. Resteront donc inconnues ou peu disponibles les aides indirectes, comme le Crédit impôt recherche et autres exonérations fiscales. Un montant global (agrégé) par entreprise est exigé, ce qui ne permettra pas de connaître précisément les aides reçues médicament par médicament, seule information capable de donner du pouvoir au régulateur public dans les négociations sur les prix.
Compte tenu des enjeux sanitaires (prix, pénuries, ruptures, manque d’accès aux vaccins dans le monde, etc.), nous trouvons irresponsables la passivité du gouvernement et son refus de prendre les mesures pragmatiques nécessaires pour guider des politiques du médicament rationnelles. Jean Castex, Olivier Véran, Bruno Lemaire font un pas, mais un pas ridicule, qui montre à quel point ils ne sont pas à la hauteur de la situation.
Nous avons proposé aux parlementaires de nouveaux amendements sur la transparence dans le cadre des prochains débats sur le PLFSS 2022. Notre check-list de la transparence rappelle des informations indispensables à produire pour éclairer les politiques de santé.