L’EMA a publié aujourd’hui un communiqué de recommandations autour d’une troisième dose des vaccins Pfizer ou Moderna contre le COVID-19. Nous appelons médias et responsables politiques à aborder cet enjeu avec précision et rigueur, en ayant en tête les enjeux éthiques décisifs, la dimension mondiale de la crise et les questions que l’EMA laisse sans réponse ou n’a pas posé.
L’Agence Européenne du Médicament (EMA) a publié ce lundi 4 octobre un communiqué de recommandations autour d’une troisième dose des vaccins Pfizer ou Moderna contre le COVID-19. Nous appelons médias et responsables politiques à aborder ce sujet avec précision et rigueur, en ayant en tête les enjeux éthiques décisifs et les questions que l’EMA laisse sans réponse, ou n’a même pas posé :
– Dans ce communiqué, l’EMA ne prend jamais en compte les enjeux mondiaux de la pandémie et de la vaccination. C’est pourtant bien l’inégal accès à la vaccination dans le monde (moins de 4 % des personnes en Afrique bénéficient d’un schéma complet de vaccination contre le COVID-19, par exemple) qui avait amené début août l’Organisation Mondiale de la Santé à demander aux pays riches un moratoire sur la troisième dose et les boosters. Comment se fait-il que ces instances se contredisent à quelques mois de distance alors que l’urgence mondiale impose une réponse coordonnée ?
– L’inégal accès aux vaccins dans le monde, le refus d’autoriser les pays pauvres à produire des vaccins depuis plus d’un an, les stocks de doses gaspillés dans les pays riches, compromettent la vie de centaines de milliers de personnes dans les pays du sud. Cela favorise aussi l’émergence de variants, dont certains pourraient devenir résistants aux vaccins existants. Dans ce cadre contraint, il est donc indispensable de se demander, y compris si on s’en tient de façon égoïste au seul intérêt des pays riches, s’il vaut mieux consacrer les doses existantes à vacciner dans les pays pauvres plutôt qu’à les dédier à une troisième dose. Pourquoi l’EMA ne s’est-elle pas posée cette question ?
Le communiqué de l’EMA évoque d’une part la situation des personnes avec un système immunitaire affaiblie. Dans ce cas, l’agence ouvre la voie à une troisième dose 28 jours après la première. Elle reconnaît cependant que « aucune preuve directe que la capacité de produire des anticorps chez ces patients protégés contre COVID-19, il est prévu que la dose supplémentaire augmenterait la protection au moins chez certains patients. »
no direct evidence that the ability to produce antibodies in these patients protected against COVID-19, it is expected that the extra dose would increase protection at least in some patients.
L’EMA distingue ensuite la population générale de plus de 18 ans, pour qui une troisième dose 6 mois après la première serait possible. Elle renvoie aux agences nationales l’émission de recommandations et rappelle que la surveillance d’effets indésirables rares reste de mise. Elle ne cite aucune étude pour appuyer cette recommandation. Ce faible niveau de preuve rend encore plus essentielles que des réponses soient apportées aux questions posées ci-dessus.
Il est désormais indispensable que les agences nationales prennent en compte ces questions, que la stratégie vaccinale s’appuie sur des éléments rationnels et que la dimension mondiale de la crise et les enjeux éthiques soient pris en compte.