« L’exemple de Teva le prouve: la capacité de production est là, mais elle ne peut être mise à contribution du fait des barrières posées par les brevets, de logiques dogmatiques alors qu’il faudrait faire preuve de pragmatisme pour répondre au mieux à la pandémie. Il s’agit de notre santé, de notre argent ; ce sont nos vaccins. »
Un des plus grands producteurs de génériques, le laboratoire Teva, dispose de capacités pour finaliser la production de vaccins contre le COVID-19, une étape nécessitant une lourde logistique. Pourtant, selon son chef exécutif interrogé le 28 avril par le Financial Times, les laboratoires qui détiennent les brevets ont refusé un accord de sous-traitance avec ce producteur de génériques alors même que la contribution de celui-ci permettrait d’augmenter massivement les quantités de vaccins disponibles.
Le droit à la santé est un droit universel qui doit être effectif. La pénurie mondiale de vaccins et l’inégale répartition des doses entre pays riches et pays pauvres compromettent toute réponse globale à la pandémie, contribuent à sacrifier des vies qui pourraient être sauvées et favorisent les mutations du virus sous des formes qui pourraient devenir résistantes aux vaccins. Pourtant, les dirigeants politiques des pays riches refusent de tout faire pour augmenter la capacité de production. L’exemple de Teva le prouve : la capacité de production est là, mais elle ne peut être mise à contribution du fait des barrières posées par les brevets, de logiques dogmatiques alors qu’il faudrait faire preuve de pragmatisme pour répondre au mieux à la pandémie. La légitimité de ces brevets est pourtant plus que questionnable puisque ces vaccins doivent tout à la recherche et l’argent publics et aux risques financiers pris par les États. Il s’agit de notre santé, de notre argent ; ce sont nos vaccins.
Depuis 8 mois, les pays riches s’opposent à l’exercice d’un droit inscrit dans le cadre des accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur la propriété intellectuelle : la levée des brevets, demandée notamment par l’Inde et l’Afrique du sud. Une telle mesure permettrait pourtant aux technologies de circuler plus rapidement et aux laboratoires qui ont la capacité de production, comme Teva, d’apporter leur contribution pour surmonter la pénurie mondiale, permettre l’exercice du droit à la santé et sauver des vies. Elle permettrait aussi de réduire les prix des vaccins.
Il est vraisemblable que ces entreprises de princeps aient refusé la proposition de Teva par peur qu’un accès aux technologies permette à ce génériqueur de leur faire concurrence sur tous les vaccins à ARN messagers dans les prochaines années. Alors qu’il faudrait prendre des décisions fortes en matière de santé publique, plutôt que de sauver des vies, les dirigeant-es des pays riches laissent les multinationales entretenir une pénurie mondiale pour des raisons de stratégies commerciales. La levée des brevets permettrait que l’urgence sanitaire, le droit à la santé et sauver des vies passent avant ces calculs financiers. Limiter l’accès aux vaccins, alors que leur recherche et leur développement ont été financés par l’argent public des Etats est profondément inéthique, et irresponsable en matière de réponse à la pandémie.