Pénuries d’antibiotiques (amoxicilline, etc.) : la position d’OTMeds

Publié le 18 novembre 2022 Dans la catégorie : Communiqués de presse , ,

« Ce qui nous inquiète, c’est que par effet domino, ça touche tous les médicaments de cette classe thérapeutique », précise ce vendredi 18 novembre matin sur RMC, Pauline Londeix, cofondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament.

https://rmc.bfmtv.com/actualites/societe/sante/craintes-sur-l-amoxicilline-antibiotique-phare-pour-les-enfants-bientot-en-rupture-de-stock_AN-202211180117.html

Lors d’une réunion d’urgence avec les associations de patient-es, qui s’est tenue jeudi 17 novembre au soir, l’agence française du médicament (ANSM) a (enfin) communiqué sur les pénuries et ruptures de médicaments qui touchent les antibiotiques, dont l’amoxicilline. Il s’agit de médicaments essentiels de l’arsenal thérapeutique. OTMeds déplore le manque de proactivité des autorités sanitaires ces dernières semaines, et d’une manière générale depuis plusieurs années, pour prévenir les ruptures et pénuries qui mettent la vie des usagers et des malades en danger. 

  • L’alerte lancée ce matin par l’Agence du médicament (ANSM) est très tardive : cela fait des semaines que les médias américains titrent sur les pénuries et tensions de l’amoxicilline, cet antibiotique très courant. Cela interroge sur la réactivité et la pro-activité de notre système de veille. 
  • Depuis plusieurs semaines, cliniciens et praticiens hospitaliers alertent sur les tensions qui touchent cette classe thérapeutique. OTMeds a enquêté auprès de différents acteurs clefs du secteur thérapeutique et lancé des alertes en sous-marin pendant cette période pour analyser les causes spécifiques pouvant expliquer ces ruptures. 
  • Les mesures mises en place par les autorités sanitaires françaises pour faire face aux pénuries reposent principalement sur une limitation de l’usage des antibiotiques jusqu’à la livraison du prochain stock début 2023. Elles sont donc tardives et ne s’attaquent pas aux causes structurelles, car sans augmentation de la production, la marge de manœuvre est très réduite. 
  • Les associations de patients et la société civile ont été mises devant le fait accompli de décisions prises sans eux. Sans s’appuyer sur la démocratie sanitaire, les politiques risquent de ne pas être aussi efficaces que si elles avaient été anticipées.
  • L’effet domino causé par le recours à des antibiotiques de substitution doit être anticipé, pour réduire le risque d’autres pénuries, mais aussi celui des résistances, causées par des mésusages.
  • D’autres classes thérapeutiques risquent d’être affectées.
  • Les tensions et pénuries sont en partie dues à une augmentation de la demande qui était prévisible au vu de la persistance du COVID et la prégnance des épidémies saisonnières qui peuvent générer des infections bactériennes. 
  • Avec le COVID, les besoins d’antibiotiques avaient baissé. Guidée par des logiques commerciales d’offre et de la demande, qui entrainent une production à flux tendu, la fabrication d’antibiotiques avait suivi à la baisse et mettra du temps à s’adapter aux nouveaux besoins. Il est nécessaire de sortir les médicaments essentiels de cette logique marchande et de mettre en place une planification sanitaire.
  • La concentration de la production de la matière première, notamment en Chine et en Inde, fragilise un peu plus la chaine d’approvisionnement. C’est d’autant plus vrai dans un contexte géopolitique tendu, sur lequel nous ne cessons d’alerter.
  • En parallèle, la crise de l’énergie impacte directement les producteurs de matière première pharmaceutique qui ferment des sites de production. Cette crise est partie pour durer et une production au moins en partie publique doit être lancée au plus vite et s’inscrire dans le long terme. 
  • Les multinationales pharmaceutiques arguent du fait que le prix des médicaments seraient trop bas, c’est une raison de plus pour confier la production à des acteurs publics, qui permettront d’éviter des ruptures aux conséquences dramatiques. Novartis, qui détient Sandoz, a augmenté son chiffre d’affaires et les dividendes distribués aux actionnaires. Si les industriels ne veulent pas assumer leurs responsabilités, que la puissance publique prenne enfin en charge la fabrication de ces médicaments essentiels, dans le cadre d’une production publique coordonnée au niveau européen. 

Retrouvez l’intervention de Pauline Londeix sur la question de la production sur RMC ce vendredi à ce lien :

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Pour aller plus loin : 

– « Combien coûtent nos vies » (éditions 10/18, septembre 2022) par Pauline Londeix et Jérôme Martin, chapitre 2 « Quand nos médicaments viennent à manquer »

https://www.lisez.com/livre-grand-format/combien-coutent-nos-vies-enquete-sur-les-politiques-du-medicament/9782264081117

– Rapport pour le parlement européen : « relocaliser la production pharmaceutique en Europe et dans les États membres » (OTMeds, mars 2022)

https://otmeds.org/wp-content/uploads/2022/02/otmeds_rapport_2022_FR.pdf

– Le Monde : « L’État doit reprendre la main sur les politiques du médicament, nos vies en dépendent », Pauline Londeix et Jérôme Martin, septembre 2022

https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/09/05/l-etat-doit-reprendre-la-main-sur-les-politiques-du-medicament-nos-vies-en-dependent_6140259_3232.html

– Le Monde : « La situation internationale nous impose de poser les bases d’une production française de médicaments », Pauline Londeix et Jérôme Martin, mars 2022

https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/03/04/la-situation-internationale-nous-impose-de-poser-les-bases-d-une-production-francaise-de-medicaments_6116077_3232.html

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