La France est entrée dans sa septième vague du COVID-19. Les réinfections y jouent un rôle de plus en plus important1. Ce que les études menées sur les réinfections nous apprennent est alarmant. Selon l’épidémiologiste Antoine Flahault qui les a analysée, ces données obligent à prendre en compte la réalité suivante :
- « Le concept de l’immunité collective est battu en brèche par le Sarscov2. » Par exemple, « plus on a été infecté dans le passé récent de cette pandémie et, plus on est à risque de réinfections au cours des vagues actuelles et à venir.»
- L’immunité individuelle induite par les variants actuels est très faible2.
- Les réinfections n’atténuent pas les symptômes. Au contraire, les données américaines suggèrent leur aggravation à toutes les étapes de l’infection3.
- Les conséquences pour la santé de chacun-e, la santé publique et le système de soins risquent d’être très lourdes si rien n’est fait pour stopper la progression des variants4.
Le gouvernement, l’exécutif, les élus de la majorité présidentielle et de l’opinion, les élus locaux, les institutions et agences de l’État doivent au plus vite en tirer toutes les conséquences ;
- Il faut cesser la politique du « laisser aller », du « vivre avec » qui consiste à laisser les individus s’infecter au détriment des personnes les plus fragiles et sans aucun recul des effets à longs termes du COVID-19 qui commencent à apparaître.
- Une réelle politique de protection des personnes doit être mise en place, en s’appuyant enfin sur autre chose que les effets d’annonce et le court-termisme. Il s’agit d’une pandémie qui s’inscrit dans un temps long et il faut donc investir sur le long terme, pour protéger les personnes.
- Cette stratégie doit être basée sur de la pédagogie, la lutte contre les inégalités en santé, une stratégie d’aller-vers, et pour cela, une implication des acteurs de terrain. Ces éléments essentiels de la santé publique, dont l’intérêt et la pertinence sont démontrés par des décennies de littérature scientifique, ont été abandonnés par les gouvernements Macron au profit de politiques de contraintes sans vision, court-termistes et inefficaces. Il est temps de les respecter.
- Il y a près de deux ans, nous alertions dans le quotidien Le Monde sur le risque d’un modèle de recherche vaccinale tournée vers la compétition et l’opacité, qui a eu pour conséquence, comme nous le craignions, de se concentrer sur le même type de vaccins. Aujourd’hui, les vaccins disponibles ont tous la même cible, gardent un intérêt essentiel pour la réduction de la mortalité (ces vaccins ont sauvé 20 millions de vies en 2021) et des hospitalisations en soins intensifs. mais en a perdu pour la prévention des transmissions. Les pouvoirs publics doivent imposer, de par leur position de principal financeur de la recherche dite « privée », des études sur d’autres types de vaccins, ainsi que des mises à jour des vaccins existants pour les adapter aux variants.
Nous demandons en urgence à l’État de tout faire pour protéger la population en assurant :
- La transparence sur les recherches vaccinales en cours, des conditionnalités aux aides publiques reçues en matière d’orientation de recherche, de coopération, de prix, d’accès mondial.
- Le rétablissement des gestes barrières, à travers des campagnes de prévention pédagogique, à travers des politiques de lutte contre les inégalités et d’aller-vers et en impliquant au plus vite les communautés associatives, locales et nationales.
- La mise en place de systèmes d’aération adaptés dans tous les lieux clos accueillant du public, notamment les transports, les centres de santé, les établissements scolaires, les universités, les administrations.
- La promotion des masques de type FFP2, un travail de pédagogie sur son usage, et une distribution gratuite aux personnes en ayant besoin (si leur prix est considéré comme un obstacle, une production à bas coût doit être envisagée en France au plus vite, dans une démarche de planification sanitaire à long terme, car la pandémie est loin d’être terminée). L’obligation du port du masque FFP2 dans certains lieux fermés fait partie de ces éléments de pédagogie.
1 Selon les données de Santé Publique France communiquées le 8 juillet dernier, 12 % des cas de COVID seraient des réinfections. Une étude britannique montre que « 41,5% des cas de covid-19 rapportés (en juin dernier) chez les adolescents anglais de 10-14 ans sont des réinfections. Cette fraction est plus basse, entre le quart et le tiers des cas de Covid-19, dans les classes d’âges des adultes de 20 à 49 ans, puis décroît au-dessous de 10% chez les 65-89 ans. » Une étude américaine, encore non revue par les pair-es, confirme l’ampleur des réinfections : sur 257 000 adultes testés positifs, 15 % ont été réinfectés dans les 6 mois suivants, et 12 % ont eu deux réinfections.
2 « L’infection par Omicron semble conférer très peu d’immunité résiduelle. Nous avions qualifié dans vos colonnes Omicron de « variant furtif » vis-à-vis de l’immunité, qu’elle soit d’origine humorale (c’est-à-dire détectable par les anticorps circulants), ou à médiation cellulaire (par les lymphocytes T). Omicron passant sous les radars de notre système immunitaire, il ne permet pas à l’organisme de se défendre efficacement en cas d’attaque ultérieure, y compris avec le même variant. »
3 « Non seulement une réinfection par le coronavirus n’atténue en rien les symptômes, mais au contraire, l’étude que je citais plus haut, conduite chez des vétérans nord-américains, a montré que les réinfections étaient associées à une augmentation de la morbidité sévère, des hospitalisations et des décès du Covid-19, chez les personnes réinfectées, tant en phase aiguë de la réinfection qu’en phase post-infectieuse (Covid longs) . »
4 « Si les premières données scientifiques que j’ai analysé ci-dessus sont transposables aux sous-variants BA.4 et BA.5 et à la France et aux autres pays européens, alors ces réinfections itératives vont peser lourd sur la santé de la population, tant en termes de recours aux soins, y compris hospitaliers lors des formes aiguës, que de soins chroniques, liés aux Covid longs, plusieurs mois après les vagues. Les capacités des nouveaux sous-variants d’Omicron à se propager et à échapper à l’immunité en font des variants potentiellement redoutables car favorisant les réinfections, et avec eux leur cortège de complications aiguës et chroniques à chaque fois plus nombreuses. Il reste à espérer, et ce n’est pas impossible, que les réinfections avec les variants BA.4 et BA.5 soient moins sévères qu’avec les précédentes souches. On le saura dans quelques semaines. »