Medtronic et les pouvoirs publics abandonnent les personnes diabétiques implantées

Publié le 30 juin 2021 Dans la catégorie : Communiqués de presse ,

En arrêtant la production de pompes à insuline implantées, le laboratoire Medtronic laisse les personnes diabétiques concernées sans solution équivalente. Les pouvoirs publics laissent faire, sans mesurer l’impact sur la qualité de vie et le risque accru, y compris mortel, pour ces personnes. Nous refusons la fatalité du scandale sanitaire à venir.

En 2019, le laboratoire Medtronic annonce l’arrêt de la production de pompes à insuline implantées et la réduction unilatérale de la garantie des pompes déjà administrées. Ces dispositifs médicaux s’adressent aux personnes diabétiques chez qui les modes d’administration classique, sous-cutanés, ne fonctionnent pas ou entraînent de lourdes réactions. Ils répondent donc à un besoin vital pour de nombreuses personnes vivant avec un diabète, et sont susceptibles d’améliorer la qualité de vie de beaucoup d’autres. Prévenus dès 2017, les pouvoirs publics ont laissé faire. Une réunion doit avoir lieu le 7 juillet prochain au ministère de la santé.

À l’annonce de Medtronic, des personnes concernées ont créé le Collectif des diabétiques implantés qui a alerté sur les conséquences pour leur vie et leur santé de cette décision purement commerciale. Malgré leur mobilisation depuis 2019, l’industriel et les pouvoirs publics se renvoient la balle, aucun changement concret n’a été annoncé et le pire risque de se produire. Quand les pompes actuellement implantées devront être changées, les personnes n’auront plus que des traitements inadaptés, auxquels elles sont soit résistantes, soit intolérantes. La qualité de vie se dégradera. Le risque d’hyperglycémies ou d’hypoglycémies graves sera renforcé. La mortalité aussi car il n’y a aucune alternative pour les patients résistants aux traitements sous-cutanés.

Tous les éléments d’un proche scandale sanitaire sont donc réunis : une politique industrielle définie par des logiques marchandes, et non celles de santé ; des responsables, privés ou publics, qui minimisent les conséquences du choix de Medtronic ; des pouvoirs publics minimisant les alertes et impuissants à assurer la défense de l’intérêt général. Nous accompagnons notre communiqué de documents prouvant que le laboratoire et les pouvoirs publics sont conscients de la menace qui pèse sur les personnes diabétiques concernées. Cette menace ne se réduit pas aux seules personnes vivant en France et concerne les patients du monde entier.

C’est parce qu’ils refusent le caractère inéluctable de ce scandale à venir que le Collectif des Diabétiques Implantés et l’Observatoire de la Transparence dans les politiques du médicament se sont associés. La mise en danger des personnes implantées est le résultat de choix, et non d’une fatalité. Ces choix doivent changer : nous demandons que Medtronic maintienne la production de pompes implantées suffisante pour couvrir les besoins vitaux jusqu’à la mise sur le marché de nouveaux modèles répondant aux besoins des personnes et qu’elle respecte la garantie de ses pompes. Nous demandons aux pouvoirs publics de tout faire pour assurer cette production, notamment par des aides publiques conditionnées à une garantie de mise à disposition effective sur le long terme.

Le dossier suivant fournit tous les éléments pour comprendre la situation et nos revendications.


01. Que sont les pompes implantées ?

  1. La pompe implantable est une pompe interne, placée sous la peau, qui permet l’administration en continu de l’insuline directement dans le péritoine.
  2. Ce mode d’administration est plus proche de l’absorption physiologique de l’insuline. Il permet un contrôle optimal du diabète et répond aux besoins des patients chez qui l’insuline ne passe pas en sous-cutané.
  3. L’utilisation des pompes implantables fait ses preuves depuis 1989, date des premières implantations en série en France.

02. À qui est destinée la pompe à insuline implantée ?

C’est aujourd’hui le seul mode de traitement des diabétiques souffrant d’une forme atypique d’insulinorésistance sous-cutanée. En dépit d’une insulinothérapie intensive par voie sous-cutanée (injections, pompe externe), ces personnes ne parviennent pas à contrôler leur glycémie. La peau fait barrière en voie sous-cutanée. Le dispositif est donc vital pour ces personnes, par exemple pour :

  1. Des diabètes instables et ingérables enchaînant des hypoglycémies et/ou des hyperglycémies graves en raison de malabsorption faisant que l’insuline se débloque de façon aléatoire.
  2. Des diabétiques présentant de graves allergies au pansement, de graves problèmes cutanés (brûlures, infections, abcès…) et ceux chez qui les canules des cathéters cristallisent.
  3. Pendant longtemps, des futures mères ne pouvaient pas envisager une grossesse sous traitement classique sous-cutané (injections, pompe externe) car leur diabète était trop instable et renforçait e le risque majeur de conduire à une fausse couche, une perte de l’enfant, un handicap moteur du bébé … mais aussi de lourdes complications pour la mère.
  4. La voie intrapéritonéale permet de stabiliser les diabètes très compliqués, notamment lors de « malabsorption », les complications liées à ce déséquilibre incontrôlable des glycémies mais aussi d’éviter tous les problèmes cutanés faisant du traitement externe un véritable calvaire.

03. Quels sont les autres avantages de ces dispositifs pour les autres personnes diabétiques ?

Les différences avec le matériel externe peuvent être importantes pour tous les diabétiques de type 1 :

  1. Il peut s’agir d’une amélioration majeure dans la vie de tout diabétique. : pas de matériel externe encombrant à accrocher où que ce soit H24, pas de tubulure ni cathéters apparents, rien de gênant, rien de visible. Elle est susceptible d’offrir confort de vie et liberté pour les personnes qui se sentent contraintes par les dispositifs habituels.
  2. Elle facilite le contrôle des doses injectées, limitant, voire supprimant hypoglycémies et/ou hyperglycémies et malabsorption car elle réplique la sécrétion endogène d’insuline, cette dernière diffusant directement là où elle est nécessaire, et pas dans les tissus périphériques comme le fait l’administration sous-cutanée.
  3. Elle s’adresse potentiellement à tous les diabétiques qui le souhaiteraient, surtout ceux, nombreux, rebutés par la taille du matériel externe classique difficilement dissimulable et encombrant ; avec tubulure et cathéter.
  4. Pour les métiers manuels et physiques, la pompe implantable peut être un bon compromis.
  5. En matière de relations affectives et sexuelles, de séduction, le matériel externe peut rebuter, induire de la honte, des complexes.

04. Pourquoi la décision unilatérale du laboratoire Medtronic menace-t-elle les personnes diabétiques implantées ?

  1. Elle nous condamne inexorablement car il n’existe pas d’alternative (tout ce qui est proposé est externe). En nous laissant sans choix d’ici la mise à disposition d’innovation technologique équivalente, Medtronic nous condamne à une dégradation inexorable de notre qualité de vie et expose même notre survie.
  2. Cette société vient de commercialiser la pompe 780G, boucle fermée en voie sous-cutanée. Celle-ci permet de changer les consommables tous les 3 jours (cathéters, tubulures…) alors que les consommables d’une pompe implantable comme le cathéter peut nécessiter d’être changé une à deux fois ou jamais en 8 ans de vie de la pompe. Cela montre bien les conséquences sur notre qualité de vie. La coïncidence de cette commercialisation avec l’arrêt des pompes implantées suggère aussi que cette dernière relève d’un choix purement stratégique et financier.
  3. Medtronic reconnait en partie les conséquences par écrit [Lettre de juillet 2020, envoyée par le Ministère le 20 juillet 2020.] mais refuse de maintenir la production le temps nécessaire.

05. En quoi l’action des pouvoirs publics est-elle insuffisante ?

  1. L’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) a été alertée en 2017, et n’a à notre connaissance pas réagi.
  2. En juin 2019, les pouvoirs publics prennent en compte la démarche du Collectif des Diabétiques Implantés sous la pression des médias (nombreux articles de presse et reportages télévisés avec le soutien du Pr RENARD, Président de l’EVADIAC (Evaluation dans le Diabète du traitement par Implants Actifs), des parlementaires français et européens qui les interpellent.
  3. Mais 4 ans plus tard, en 2021, si le problème est posé et reconnu, et malgré plusieurs rendez-vous au ministère de la santé, aucune solution viable n’a été apportée, juste des mots et des belles promesses.
  4. Les pouvoirs publics nous proposent des traitements alternatifs qui ne sont absolument pas adaptés à notre problème vital de malabsorption de l’insuline. Cet abandon et ce décalage avec notre réalité nous condamnent inexorablement.

06. En quoi l’action des pouvoirs publics est-elle insuffisante ?

  1. L’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) a été alertée en 2017, et n’a à notre connaissance pas réagi.
  2. En juin 2019, les pouvoirs publics prennent en compte la démarche du Collectif des Diabétiques Implantés sous la pression des médias (nombreux articles de presse et reportages télévisés avec le soutien du Pr RENARD, Président de l’EVADIAC (Evaluation dans le Diabète du traitement par Implants Actifs), des parlementaires français et européens qui les interpellent.
  3. Mais 4 ans plus tard, en 2021, si le problème est posé et reconnu, et malgré plusieurs rendez-vous au ministère de la santé, aucune solution viable n’a été apportée, juste des mots et des belles promesses.
  4. Les pouvoirs publics nous proposent des traitements alternatifs qui ne sont absolument pas adaptés à notre problème vital de malabsorption de l’insuline. Cet abandon et ce décalage avec notre réalité nous condamnent inexorablement.

07. Quelles sont nos demandes aux dirigeants de Medtronic ?

  1. Qu’ils gardent la ligne de production ouverte jusqu’à l’arrivée des nouvelles pompes. Éventuellement, qu’ils passent par de la sous-traitance auprès de start-ups.
  2. Qu’ils maintiennent la garantie contractuelle de 6 ans qu’ils ont ramenée unilatéralement à 2 ans. Cette garantie est mentionnée sur le site AMELI.
  3. Qu’ils appliquent leur mission afin d’honorer leur engagement en continuant la production de la pompe implantable jusqu’à ce qu’un dispositif équivalent soit autorisé et que les nouvelles pompes arrivent sur le marché, ou de financer et faciliter le travail de PhysioLogic Devices, basée en Californie et BaatMedical, société Hollandaise, pour accélérer la mise sur le marché d’une nouvelle pompe. Selon leur propre site, Medtronic est le leader mondial de la santé en dispositifs médicaux dont les mission sont de :
    1. « Contribuer au bien-être de l’homme en appliquant les principes de l’ingénierie biomédicale à la recherche, à la conception, à la fabrication et à la distribution de matériels ou d’appareillages qui soulagent la douleur, rétablissent la santé et prolongent la vie. 
    2. Orienter notre croissance vers les secteurs de l’ingénierie biomédicale dans lesquels nous possédons une expertise incontestée ; rassembler les personnes et créer des conditions qui favorisent le développement de ces secteurs ; assurer la formation et l’assimilation des connaissances dans ces domaines ; nous engager uniquement dans des secteurs où notre apport sera unique et significatif 
    3. Tout mettre en œuvre et nous investir à fond pour atteindre une fiabilité et une qualité au-dessus des normes ; pour devenir le modèle de référence et être une entreprise reconnue pour notre engagement et nos valeurs d’honnêteté, d’intégrité et de service.
    4. Dégager un profit raisonnable de nos activités pour pouvoir faire face à nos obligations, maintenir notre taux de croissance et atteindre nos objectifs
    5. Reconnaître la valeur personnelle de tous nos collaborateurs et créer un environnement de travail satisfaisant, offrant sécurité, possibilités d’avancement et participation au succès de la société.
    6. Remplir nos responsabilités citoyennes en tant qu’entreprise. » 

08. Quelles sont nos demandes aux pouvoirs publics à l’approche de la réunion du 8 juillet ?

  1. Ces pompes sont prises en charge par la Sécurité sociale. Que les pouvoirs publics s’organisent pour financer directement les entreprises tout en s’assurant que le dispositif sorte des logiques marchandes qui condamnent les personnes. Ce soutien public doit par exemple se traduire par des conditionnalités contraignant les entreprises en matière de mise à disposition et de continuité.
  2. Qu’ils contraignent Medtronic à être transparent quant aux subventions et aides publiques reçues pour les recherches, développement et commercialisation de leur pompe implantée. Cette transparence est nécessaire pour orienter les politiques publiques de santé et faire évoluer les conditions émises aux aides publiques afin que l’État n’encourage pas de telles pratiques qui mettent en danger des personnes pour des logiques marchandes.
  3. Même au sein de ces logiques marchandes, on peut considérer que le marché potentiel est BEAUCOUP plus large que ce qu’ils disent et les risques très limités, voire inexistants car la demande est là. Ce matériel s’adresse en effet aux quelque 20% de patients sous pompes externes souffrant d’insulinorésistance, de réactions cutanées mais aussi à tous ceux – très nombreux – refusant le matériel externe en raison de son volume et de l’inconfort de vie qu’il occasionne.
  4. Cette démarche s’inscrit dans la politique de rapatriement des industries de pointe en Europe, qui ne peut pas faire l’impasse sur les moyens de sortir le médicament des logiques marchandes.
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